Accomplissement sportif et motivation : regard du psy
Chacun
en conviendra très certainement, le rôle premier de tout entraîneur est
de faire en sorte que l’expérience sportive soit positive pour tous les
athlètes dont il s’occupe. Malheureusement, cette préoccupation pour
l’accomplissement de tous cède bien souvent le pas à la logique des
résultats. Si cette logique peut se concevoir pour les athlètes
évoluant au plus haut niveau, elle ne devrait jamais devenir la
préoccupation centrale des entraîneurs s’occupant de plus jeunes
sportifs. De nombreuses études ont ainsi mis en évidence que lorsque
les résultats deviennent l’objectif prioritaire, ils contribuent à
installer une dynamique qui rend paradoxalement la performance plus
difficile.
Ric Charlesworth a entraîné de 1993 à 2000 la sélection
australienne de hockey féminin. Pendant qu’il était à la tête de
l’équipe nationale, il a notamment remporté deux fois les Jeux
Olympiques et deux fois les Championnats du Monde (confer Bodytalk,
237, pp. 6-7). Selon cet entraîneur : « Ce n'est pas le résultat qui
compte et, paradoxalement, c'est en fixant d'autres priorités que le
résultat que l'on finit par gagner ». Mais quelles peuvent être ces
autres priorités dont parle Ric Charlesworth ? Comment faire en sorte
que l’expérience sportive soit une expérience positive pour le plus
grand nombre ?
Lorsque des enfants et adolescents sont interrogés à propos de ce
qu’ils aiment dans leur sport, voici ce qu’ils répondent : apprendre,
s’amuser, être avec des amis, vivre des sensations fortes, obtenir des
succès, améliorer sa condition physique (Gould & Petlichkoff,
1988). Cette enquête révèle que si les résultats contribuent à rendre
l’expérience sportive motivante, d’autres facteurs doivent être
impérativement rencontrés pour les jeunes sportifs restent motivés par
leur sport.
« Être motivé »… qu’est-ce que cela signifie ?
Tout entraîneur rêve de ne compter dans son équipe que des
sportifs profondément motivés par leur sport, prêts à fournir des
efforts importants pour leur équipe, persévérants malgré les
difficultés de l’entraînement et manifestant une rage de vaincre et de
réussir sans faille. Chacun considérera de tels sportifs comme
« motivés ». Par contre, on dira plutôt d’un sportif qui s’investit peu
pour son équipe, qui se montre facilement découragé par la difficulté
des entraînements ou les revers de la compétition qu’il n’est pas ou
plus motivé par son sport.
La motivation est considérée, à raison, comme un facteur essentiel
pour l’accomplissement personnel et la réussite tant individuelle que
collective. Comment un sportif pourrait-il s’amuser, apprendre et
progresser dans son sport s’il n’est pas « motivé » ? Comment un
sportif pourrait-il parvenir (et se maintenir) au plus haut niveau s’il
n’est pas « motivé » ?
Malheureusement, la motivation ne suscite parfois l’intérêt des
entraîneurs que lorsqu’elle semble être absente… Par défaut,
l’entraîneur s’attend à travailler avec des athlètes motivés. D’aucuns
estiment d’ailleurs que « se motiver » relève de la seule
responsabilité du sportif.
Pour Vallerand et Thill (1993, p. 18), « le concept de motivation
représente le construit hypothétique utilisé afin de décrire les forces
internes et/ou externes produisant le déclenchement, la direction,
l’intensité et la persistance du comportement ». Plusieurs points sont
utiles à souligner. Premièrement, la motivation est difficilement
observable. Deuxièmement, en faisant référence à l’action de forces
(internes et/ou externes), l’accent est mis sur le caractère dynamique
de la motivation. Enfin, cette définition insiste sur le fait que
l’action de ces forces détermine le comportement (déclenchement,
direction, intensité et persistance des comportements).
Sur base de cette définition, il est utile de faire la distinction
suivante : LA motivation et LES motivations sont deux choses
différentes. LA motivation n’est pas un état psychologique, mais bien
un processus décisionnel qui s’inscrit dans le temps. Ce processus peut
être comparé à une « évaluation permanente » : dans quelle mesure mon
comportement me permet-il d’obtenir ce qui a de la valeur à mes yeux ?
La motivation est donc un processus (de décision) à travers lequel
un individu affecte ses ressources (temps, énergie, talent,…) à
diverses activités afin d’en retirer des bénéfices ayant de la valeur à
ses yeux.
Ce processus est une sorte d’interface entre mon environnement et
MES motivations. Mon environnement m’offre une série de possibilités,
mais certaines ont plus de valeur à mes yeux. Je vais donc choisir de
m’investir dans les activités qui, à mon sens, me permettront d’obtenir
ou de faire ce qui a de la valeur à mes yeux. Dès lors, si mes
motivations changent, mon comportement va changer. De la même manière,
si mon environnement évolue, s’il ne me permet plus d’obtenir ce qui
est important pour moi, alors mon comportement va sans doute changer
également.
Un « modèle » de la motivation
Voici un schéma utilisé ci-dessous pour décrire le processus de la
motivation. Il s’agit d’une vision simplifiée de ce processus, mais
elle vous aidera à distinguer différents aspects et à mieux comprendre
comment ils interagissent.
Le modèle se compose de trois dimensions principales qui interagissent tout au long du processus :
1) Les buts font référence aux préférences
personnelles, à ce qui a de la valeur pour un individu et que celui-ci
cherche à atteindre (fiche Accomplissement sportif et motivation. Les
buts.).
2) La confiance est un élément important du
processus qui va notamment influencer l’engagement de l’individu (fiche
Accomplissement sportif et motivation. Engagement = importance x
confiance
3) L’engagement fait référence à l’intensité et à la
persévérance avec laquelle l’individu va poursuivre les buts qu’il
valorise (fiche Accomplissement sportif et motivation. Sentiment de
compétence et orientation motivationnelle).
Fabrice Dezanet, psychologue
25/07/2009